Mon travail consiste à garantir la pérennité de la société



Comment êtes-vous entré dans le monde du transport ?

Philippe Virtel : après des études commerciales générales, j’ai effectué un stage en alternance chez Vallourec, au service transport, et à l’École supérieure des transports. Je travaillais dans une grande entreprise alors que ma culture familiale était plutôt celle de l’entrepreneuriat, mon père étant dirigeant d’une petite entreprise de transport. Cette première expérience de trois ans et demi chez un grand industriel m’a beaucoup appris.

J’ai ensuite intégré l’entreprise Vallourec, ce qui m’a permis de connaître tous les modes de transport de l’époque : le ferroviaire, la route, le fluvial, le maritime et l’aérien. Ainsi et en quelques années, j’ai énormément appris sur le monde du transport et de l’industrie lourde qui est le cœur de métier de Vallourec. Mon intérêt grandissait à mesure que j’accumulais de l’expérience et cela m’a transmis la passion du monde du transport.

Comment avez-vous rejoint MGE Transports ?

P. V. : en 1986, mon père m’a proposé de rejoindre l’entreprise familiale pour, progressivement, être en mesure de la reprendre. Après un an de réflexion, j’ai accepté sa proposition et suis entré chez MGE en tant qu’observateur tout d’abord. Puis, petit à petit, j’ai pris des responsabilités dans l’entreprise dont le métier était finalement assez différent de ce que je connaissais chez Vallourec. En effet, MGE vend des prestations de transport et jusqu’alors je m’étais contenté de les acheter, la différence est grande ! Et enfin, en 1994, je suis devenu Directeur Général de MGE Transports.

La réputation de MGE Transports la précède, pouvez-vous nous rappeler son histoire ?

P. V. : MGE Transports a été fondée en 1882 et c’est en 1958 que mon père l’a rachetée. C’était une petite entreprise qui faisait du magasinage, c’est-à-dire de l’entreposage de marchandises dans des entrepôts agréés par l’État et la Banque de France. Les marchandises conservées permettaient de garantir des prêts bancaires. Petit à petit, l’entreprise s’est tournée vers le transport routier sous l’impulsion de mon père qui avait créé une agence en douane et pris la concession de manutention sur le port fluvial d’Épinal, qui était alors un petit port recevant des péniches de 38,5 mètres. Avec les activités de douane et de déchargement de péniches, il était naturel de s’intéresser au transport routier de marchandises. MGE s’est alors mise à livrer l’industrie papetière, traditionnelle dans notre région. MGE transportait ainsi principalement du charbon pour l’énergie et de la pâte à papier ou de la cellulose comme matière première du papier. En parallèle, MGE s’est diversifiée dans les travaux publics et les produits pétroliers dès le milieu des années 1960.

Puis, MGE a développé des services de transport vers l’Italie avec un petit groupe de conducteurs pionniers qui ont tenté l’aventure. Et pour accompagner ses clients, l’entreprise a été amenée à transporter dans une grande partie de l’Europe avec une flotte de camions qui s’étoffait et a assez vite atteint 50 unités à la fin des années 1970.

Et aujourd’hui, où en est votre entreprise ?

P. V. : nous disposons d’une flotte de 350 tracteurs routiers, uniquement des tracteurs et semi-remorques qui font essentiellement de la masse lourde en « BtoB » au service de l’industrie de production de masse.

Nous n’employons que des travailleurs français et les coûts sociaux ne nous permettent pas d’être en compétition sur des flux longue distance nationaux ou européens. Alors aujourd’hui, après avoir essaimé dans toute l’Europe dans les années 1970-1980, nous avons réduit notre champ d’action à la grande moitié Est de la France, l’Italie du Nord, l’Allemagne rhénane et le Benelux. Cela nous permet de travailler à compétition gagnante face aux entreprises faisant appel aux travailleurs détachés.

Nous avons environ 340 conducteurs et 100 salariés sur des fonctions support de ventes, exploitation, caristes, agents d’entrepôts, mécaniciens et nettoyeurs de citernes. Nos salariés sont presque tous en CDI. 75 % de l’effectif étant originaire des Vosges et de Meurthe-et-Moselle. En effet, pour des questions d’organisation du temps de travail, il nous faut recruter des conducteurs proches géographiquement de nos clients. Nous avons un turn-over de 12 %, ce qui est inférieur au taux de rotation des emplois dans le secteur du transport routier. Nous observons actuellement deux types de conducteurs routiers : ceux qui ont choisi leur métier et ceux qui y sont venus contraints par la conjoncture économique. Nous constatons assez naturellement que la première catégorie reste beaucoup plus longtemps que la seconde. Dans ce contexte, notre travail consiste à faire aimer le métier du transport routier à ceux qui y sont entrés contraints par la crise de l’emploi. Nous réalisons annuellement entre 50 à 55 millions d’euros de chiffre d’affaires et sommes organisés en trois pôles. Un pôle transport produits en vrac (produits pondéreux, liquides dangereux et pulvérulents) qui réalise 63 % de notre chiffre d’affaires, un pôle transport produits conditionnés correspondant à 32 % du CA et une activité logistique qui représente 5 % du CA.

Quels sont les axes de développement de MGE Transports ?

P. V. : l’un de nos principaux axes de développement consiste à aller chercher une capacité à servir nos clients fidèles sur un territoire de plus en plus large. Ainsi, nous nous orientons vers du sur-mesure pour des industriels qui en expriment clairement le besoin et qui sont prêts à payer un peu plus pour un service de qualité. Nous avons par exemple développé, depuis 5 ans, le transport combiné qui souffre actuellement d’une conjoncture défavorable face au transport routier seul (décongestion routière depuis 2008, prix du pétrole en baisse, extension des capacités de transport à 44 tonnes pour tous types de transport et abandon des projets de taxation des infrastructures). Cependant et malgré ce contexte, le transport combiné conserve l’avantage environnemental et social. En effet, il participe à la réduction des émissions polluantes et relocalise les emplois de transporteurs à proximité des zones de chargement et de déchargement. Ce mode de transport est donc avantageux pour les chauffeurs ouest-européens face aux travailleurs détachés. Le transport combiné permet donc, en attendant le retour à une conjoncture plus favorable, de valoriser le savoir-faire des chauffeurs qui s’exprime réellement dans les premiers et les derniers kilomètres du trajet (comportement commercial, prise d’initiatives, etc.).

Fiche d’identité
Dénomination : MGE Transports
Activités : Transport routier, transport combiné
Siège social : Chavelot (88)
Chiffre d’affaires : entre 50 et 55 M€
Effectif : environ 440 personnes

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