Nous avons su rebondir après un dépôt de bilan



Quel est votre parcours et comment êtes-vous arrivé à la tête de votre entreprise ?

Michel Uséo : l’entreprise Uséo Bâtiment est une histoire de famille ! Elle a été fondée en 1896 par mon arrière grand-père. La société s’est, depuis, transmise de père en fils. Quand je l’ai intégrée en 1977, en tant qu’ouvrier salarié, elle était alors dirigée par mon père, associé à 50/50 avec un de ses cousins. Quand mon père est parti à la retraite, j’ai repris ses parts aux côtés de son associé. Puis en 2001, j’en suis devenu l’unique dirigeant.

Quel est le savoir-faire de Uséo Bâtiment ?

M. U. : nous intervenons, depuis les origines de la société, dans le gros œuvre, à la fois en rénovation et en construction neuve.

Comment a évolué la société pendant toutes ces années ?

M. U. : au plus fort de son activité, Uséo Bâtiment comptait 40 ouvriers. Quand je suis arrivé à la fin des années 1970, nous étions une trentaine de salariés et 17 quand j’en ai repris les rênes. Aujourd’hui, nous ne sommes plus que 7.

Que s’est-il passé ?

M. U. : entre 2001 et 2008, nous avons vécu de très belles années et l’entreprise s’est bien développée. Mais pour faire face à la demande, nous avons consenti de lourds investissements. C’était juste avant la crise. Puis le marché s’est retourné et nous avons été touchés de plein fouet par la baisse de la demande. Lourdement endettés et incapables de rembourser, nous avons déposé le bilan en 2009. L’entreprise a alors été placée en redressement judiciaire simplifié par le tribunal de commerce.

Comment avez-vous vécu ces années sombres ?

M. U. : c’était la première fois que je faisais face à ce type de situation. Cela a été très dur, surtout les 6 premiers mois. Ensuite, des solutions se sont dessinées et j’ai eu un peu plus de visibilité sur notre avenir.

Quelles solutions précisément ?

M. U. : la première chose que nous avons faite a été de vendre notre actif immobilier. Nous avions des bâtiments construits en 1971 à Paimpol, que nous avons dû céder. Cela nous a permis d’apporter du cash et de restaurer nos fonds propres. Nous avons ainsi réussi à combler le déficit, payer nos fournisseurs et poursuivre l’activité. Dès 2010, nous nous sommes relevés du dépôt de bilan. Nous avons également été contraints de nous séparer de 3 personnes. Et, parallèlement, nous n’avons pas remplacé les salariés partis à la retraite.

Comment se sont déroulées les années qui ont suivi ?

M. U. : nous avons intégré de nouveaux locaux en location à Paimpol, au sein d’une pépinière d’entreprises. Nous y sommes restés 7 ans, le temps de reconstituer notre trésorerie.

Quand vous êtes-vous sentis « hors de danger » ?

M. U. : nous avons été accompagnés par le mandataire judiciaire jusqu’en 2014. Mais ce n’est réellement qu’à partir de 2016 que nous nous sommes sentis plus sereins. Aujourd’hui, nous sommes assez solides. Nous avons intégré nos nouveaux locaux au début de cette année. Un tout nouveau bâtiment de 400 m2 que nous avons fait construire l’année dernière à Lézardrieux sur un terrain que nous avons acquis.

Gérez-vous votre entreprise différemment aujourd’hui ?

M. U. : j’ai une gestion plus prudente de la trésorerie et je freine un peu plus sur les achats. Je continue d’investir, certes, mais dans du matériel plus adapté à la taille de notre structure. Je ne fais plus d’investissements lourds comme j’ai pu le faire avant la crise. Si nous avons besoin d’engins lourds ou de gros matériels, nous nous tournons désormais vers la location. L’offre est aujourd’hui bien plus dense qu’à l’époque, en 2008. Les parcs sont remplis de matériels lourds et nous trouvons facilement ce dont nous avons besoin.

Sur quels types de chantier intervenez-vous ?

M. U. : nous prenons en charge des chantiers entre 500 K€ et jusqu’à 1,5 M€. Ce sont des projets qui s’étalent parfois sur plusieurs années. Nous réalisons tous les travaux de gros œuvre et de charpente. La part de la rénovation dans notre activité peut être assez variable selon les années. En 2017, elle s’élevait à 50 %, mais elle peut représenter jusqu’à 80 % de notre chiffre d’affaires.

Qui sont vos clients ?

M. U. : nous travaillons à 80 % pour le secteur privé (rénovation ou neuf). L’essentiel de nos commandes passe par le biais de cabinets d’architectes. Nous réalisons aussi bien des chantiers pour des particuliers que pour des professionnels. Les 20 % restant résultent de marchés publics.

Comment se porte votre entreprise ?

M. U. : l’activité est assez cyclique, mais globalement, notre chiffre d’affaires oscille entre 1 et 1,2 M€ ces dernières années. En 2017, nous avons fini l’année à environ 1,1 M€ avec une équipe de 7 personnes, 6 salariés et moi-même. Ces derniers mois, de septembre à janvier, ont été assez calmes mais, depuis peu, l’activité repart bien. Notre principale difficulté, ce sont les prix qui sont de plus en plus tirés vers le bas alors que nos charges, elles, augmentent. Nous le ressentons très fortement lors des appels d’offres et des marchés publics. Honnêtement, je ne sais pas comment cela va évoluer.

Sentez-vous une forte concurrence dans votre région ?

M. U. : nous intervenons dans un rayon géographique de 50 km environ autour de notre nouvelle ville d’adoption. Et je peux vous dire que la concurrence ne manque pas ! Nous faisons face à 2 ou 3 concurrents locaux, mais aussi aux gros acteurs régionaux ainsi qu’aux leaders nationaux. La concurrence est réellement très vive.

Pensez-vous embaucher de nouveau ?

M. U. : non, pas dans l’immédiat. Mon objectif pour le moment est, avant tout, de pérenniser l’activité. Je pense que nous allons rester à 7 salariés en recourant à des intérimaires en cas de pic d’activité. Nous allons certes remplacer des ouvriers qui doivent partir à la retraite, mais je ne prendrai pas le risque de faire de nouvelles embauches pour l’instant.

Fiche d’identité
Dénomination : Uséo Bâtiment
Activité : travaux de gros œuvre (neuf et rénovation)
Siège : Lézardrieux (22)
Chiffre d’affaires : 1,1 M€ en 2017
Effectif : 7 personnes

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