S’investir pleinement dans le projet



Résumé : La location-gérance, c’est la formule entrepreneuriale qu’a choisi Johan Dubourdieu pour pouvoir travailler en couple dans une région qu’il affectionne.

Vous dirigez le relais & châteaux castel clara, thalasso et spa**** à belleîle- en mer. Dans quelles conditions avez-vous repris cet établissement ?

Johan Dubourdieu : Après un début de carrière dans le marketing touristique, j’ai pris la codirection d’un important établissement hôtelier à Lourdes de 2007 jusqu’à fin 2010. Par la suite, j’ai cherché un nouveau projet de vie afin de travailler avec mon épouse. Un chasseur de tête a retenu ma candidature pour reprendre cet hôtel de Belle-Île. Après un processus de sélection classique, le propriétaire m’a désigné. Pour moi, c’était très excitant de venir travailler dans cette région que j’apprécie beaucoup.

Le passage de témoin s’est-il fait immédiatement ?

J. D. : Non, j’ai d’abord travaillé quasiment un an en tant que directeur général salarié, en tandem avec le propriétaire. Le but était de m’imprégner du fonctionnement de l’hôtel, mieux connaître le personnel qui est nombreux et jauger la clientèle. Le feeling est bien passé et, en décembre 2011, je signais le contrat de location-gérance avec un an d’avance sur ce que prévoyait le propriétaire. Nous entamons donc avec mon épouse la troisième année aux commandes de l’établissement. Nous nous complétons bien : elle s’occupe de toute la partie relation clients et fait en sorte de remplir intelligemment l’hôtel. Moi, en tant que chef d’entreprise, je supervise la gestion, la commercialisation, la promotion et le management du personnel.

Quels sont les avantages et les inconvénients d’une location-gérance ?

J. D. : Le principe, c’est que je suis responsable de tout mais propriétaire de rien. Effectivement, je pilote la gestion, le recrutement, les travaux… sans pour autant posséder les murs ni le fonds. Concrètement, je suis le gérant d’une SARL qui est en charge de l’exploitation du Castel Clara. Si je fais des bénéfices, ils sont à l’actif de mon entreprise. En contrepartie, je verse au propriétaire un loyer dont le montant est prévu au contrat de location-gérance. Je suis donc très libre de mes mouvements, mais c’est une liberté sous contrôle. Tant que le remplissage est correct et que les indices de satisfaction restent à un bon niveau, tout va bien. Mais en cas de trop forte perte de clientèle ou de dégradation de l’image de l’entreprise, le propriétaire est en droit de reprendre la gestion immédiatement. Membre de l’association Relais & Châteaux, l’établissement doit respecter un certain nombre de critères de qualité.

Ce système d’entrepreneuriat répondil à vos attentes en termes de revenus ?

J. D. : Très franchement, au tout début non. Le propriétaire inaugurait ce système de location-gérance et par prudence, il avait fixé au départ un loyer assez élevé, notamment pour écarter les opportunistes. La première année, nous n’avons quasiment pas fait de bénéfices en tenant compte du coût du loyer. La saison suivante, le résultat a été un peu plus satisfaisant. Mais au bout de deux ans, je tire un bilan très positif. Nous avons clairement gagné la confiance du propriétaire. Il est satisfait des dernières améliorations réalisées dans l’établissement et du sérieux de notre gestion. Désormais, le loyer est fixé en fonction de l’évolution du chiffre d’affaires. Un point rassurant qui incite à nous investir durablement dans cet hôtel.

Quels sont, selon vous, les ingrédients de la réussite d’une location-gérance ?

J. D. : D’abord une entente et une confiance mutuelle entre locataire et propriétaire. Mais aussi de la part du gérant, une vraie passion pour son travail afin de s’investir pleinement dans le projet et le faire progresser. Par exemple, nous avons beaucoup travaillé pour améliorer la cuisine de l’établissement qui n’était pas à mon arrivée le point fort. Il fallait lever certains freins qui empêchaient le chef de donner toute la mesure de son talent. Nous avons organisé des formations et écouté davantage les avis des clients pour finalement recalibrer toutes nos cartes. Actuellement, le taux de satisfaction n’est pas loin de 100 %.

Quels sont vos projets de développement ?

J. D. : Poursuivre la rénovation régulière des chambres et bâtiments, développer des produits alimentaires faits maison et idéalement décrocher une étoile au Michelin pour le restaurant… Les projets sont nombreux. Cette étoile serait un atout pour attirer une clientèle internationale. C’est l’un de nos prochains chantiers : faire connaître notre petit paradis à l’étranger. Il faut réduire notre trop grande dépendance au marché français dont le dynamisme économique est incertain, notamment en renforçant notre présence sur les marchés suisses, anglais et allemands.

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