Quel a été le parcours qui vous a amené à la création de Bim ?
Anne-Christelle Pérochon : diplômée de la Reims Management School, j’ai démarré ma carrière dans le Private Equity chez Axa Private Equity. Je me suis tournée vers l’investissement avec l’idée de mieux comprendre les problématiques de croissance des entreprises, ce qui s’est avéré être un atout pour créer par la suite ma start-up. Ma carrière semblait toute tracée dans le Private Equity jusqu’à ce que je fasse un voyage à Tokyo en 2014 au cours duquel j’ai été au cœur du problème que propose de résoudre Bim aujourd’hui, à savoir découvrir et réserver facilement et à la dernière minute des adresses de restaurant de qualité. À mon retour, j’ai procédé à une analyse fine du marché de la FoodTech qui se compose, selon moi, de 4 verticales, à savoir la découverte, la réservation, le paiement et la livraison. Et j’ai identifié qu’il y avait un vrai no man’s land sur la première composante qu’est la découverte. Ce qui m’a conduit à créer Bim.
Quelles ont été les étapes de développement de Bim ?
A.-C. P. : notre modèle s’est construit de manière itérative. Dans un premier temps, j’ai eu conscience de l’opportunité sur la découverte puisque les acteurs en présence, TripAdvisor ou Yelp, avaient des modèles qui s’essoufflaient, notamment en raison des scandales autour des faux avis en ligne (plus de 45 % !) qui ont considérablement décrédibilisé ce modèle aussi bien aux yeux des clients que des restaurateurs. Dans un premier temps, l’idée a été de proposer une alternative qualitative basée sur la curation, qui consiste à agréger des sources de qualité auxquelles on peut vraiment se fier et qui regroupe plus de 200 guides et acteurs de référence dans le domaine de la gastronomie. Grâce à ce processus, nous avons identifié 10 % d’établissements éligibles aux standards de qualité de Bim. Ce qui a été déterminant dans la suite de la stratégie, ça a été la découverte d’un no-show (annulation de dernière minute) de 20 %. J’ai réalisé qu’il y avait une offre et une demande qui se répondaient avec d’un côté, des établissements qui avaient besoin de remplir leurs établissements annulés à la dernière minute et d’autre part, des clients qui souhaitaient réserver une table à la dernière minute. Nous avons développé une interface qui permet aux restaurants de proposer aux utilisateurs leurs tables annulées à la dernière minute. L’appli Bim a été lancée en avril 2016 avec la brique découverte. Au final, le positionnement de Bim peut se résumer ainsi : être une intelligence artificielle au service des clients comme des restaurateurs pour digitaliser l’expérience des sorties au restaurant.
Comment se rémunère Bim ?
A.-C. P. : le système de rémunération de Bim est basé sur un abonnement de 39 € à la charge des restaurateurs pour qu’ils puissent accéder à la plate-forme, auquel s’ajoute une commission prise sur chaque réservation (5 % de l’addition). L’abonnement est rentabilisé dès la première table (3 couverts) apportée par Bim. Côté utilisateurs, le service est gratuit.
Quels leviers activez-vous pour développer votre notoriété et recruter de nouveaux utilisateurs ?
A.-C. P. : nous actionnons plusieurs leviers. Le 1er est celui du marketing digital via Facebook, qui nous sert beaucoup dans notre stratégie d’acquisition. Le 2e levier est celui du brand content qui nous permet de créer des contenus éditoriaux qualitatifs diffusés sur les réseaux sociaux, sur le magazine Bim 100 % digital. Celui-ci a été officiellement lancé en janvier 2017 et sa vocation est d’offrir, à travers l’humain et l’image, un regard éclairé sur les tendances food et lifestyle. Il est alimenté au jour le jour par une équipe de rédaction avec plusieurs types de formats : news, contenus vidéo d’influenceurs (Guy Savoye, Cassius..), recettes de chefs… Le 3e levier est celui de l’événementiel avec l’organisation chaque mois d’un dîner unique dans un établissement avec un vrai défi lancé au chef.
Comment avez-vous financé votre développement ?
A.-C. P. : nous avons effectué 2 levées de fonds en 2016 pour un montant de 1 M€ auprès de business angels français et nous venons d’en faire une troisième. Je me suis personnellement impliquée dans la recherche de levées de fonds. L’enjeu a été de convaincre les investisseurs en démontrant comment le produit répondait bien à un besoin, en prouvant que le marché était suffisamment large pour en faire un business et que le timing de lancement de Bim était le bon.
Quels sont les facteurs clés de succès pour durer dans l’univers de la FoodTech ?
A.-C. P. : d’abord, avoir un concept qui répond à un vrai besoin. Puis rapidement confronter son idée au marché. Et la faire évoluer en permanence en restant à l’écoute du marché pour toujours coller au plus près aux attentes du marché. Ensuite, bien s’entourer, que ce soit au niveau des investisseurs, des coéquipiers, des associés que des partenaires. L’enjeu RH – disposer d’une équipe à la fois compétente et motivée – est déterminant pour la réussite d’une start-up. La principale difficulté a donc été de trouver au départ de bons développeurs, de bons partenaires sur la partie technique. Ensuite, c’est un cercle vertueux. À partir du moment où on a réussi à se constituer une bonne équipe de base, c’est beaucoup plus facile de l’élargir ensuite à d’autres talents. Notre belle cohésion d’équipe nous permet aujourd’hui d’avancer rapidement sur les challenges auxquels nous sommes confrontés.
Comment envisagez-vous l’avenir ?
A.-C. P. : avec confiance ! Nous avons dépassé les 100 000 utilisateurs et nous enregistrons 30 % de croissance par mois au niveau des utilisateurs. Notre ambition est d’être l’acteur de référence sur le secteur du premium dining à travers la data et la technologie en temps réel, d’être le trait d’union entre les meilleurs établissements gastronomiques et les convives. Aujourd’hui, l’expérience de Bim est déjà complète dans sa forme actuelle, mais nous pourrions aller encore plus loin dans sa personnalisation. Le lancement de Bim dans toute la France en septembre, y compris dans des zones rurales où on peut trouver aussi des restaurants de très grande qualité, est une étape importante de notre développement sur 2017. En 2018, nous envisageons une extension à l’international. Enfin, nous avons lancé notre chatbot en septembre car je pense que les applications vont progressivement perdre du terrain au profit des robots conversationnels.
Fiche d’identité
Dénomination : Bim
Activité : réservation de table en ligne de dernière minute
Nombre d’utilisateurs : 100 000 (à fin juillet), +30 % de croissance par mois
Effectif : 17 (1/3 marketing, 1/3 commercial, 1/3 technique, avec à la fois des designers et des développeurs)
© Les Echos Publishing - 2017